File dans ta chambre





Photo ©️Marin Dumitru

La régression cognitive et la perte des inhibitions font remonter de nos mémoires des souvenirs étonnants.

A défaut de passer très régulièrement voir Elsa, j’appelle les infirmières pour avoir de ses nouvelles.
« Votre maman va plutôt bien, son interaction avec les autres résidents est bonne.
Bon, on a eu un souci hier mais rien de grave : elle a agressé d’autres résidents et était très agitée.
Alors on l’a mise dans sa chambre pour se calmer.
Elle accepte volontiers de se calmer dans sa chambre 🙂.
En général elle fait une petite sieste puis ressort une heure plus tard, détendue. »

🙄🤔
...
Et là je me souviens.

Nous sommes une fratrie de trois garçons.
Je suis le dernier, et avec mon frère cadet nous étions enfants comme chien et chat ; pas un jour sans insulte, pas un jour sans bagarre.
Ou presque.

Elsa en général avait une réponse toute faite qui fonctionnait plutôt pas mal : 
Après avoir séparé les protagonistes et évité soigneusement de chercher à comprendre qui avait fait quoi, elle nous envoyait dans notre chambre.
« File dans ta chambre !
Et tu n’en sortiras que quand tu seras calmé ! »

Elsa a ce don aujourd’hui de faire ressurgir des souvenirs enfouis.
Je me souviens alors parfaitement de ces moments. 
De la sensation d’injustice totale au moment de la sentence, de ces moments de solitude salvatrice avec mes legos, puis de la redescente et ce sentiment d’apaisement après.

Je l’avais évoqué avec la baffe reçue il y a peu alors que je lui rattachais son lacet.

Je me dis que ces petits rituels de retour au calme lui rappellent peut-être ceux qu’elle mettait elle-même en place par le passé pour ses propres enfants et avec un certain succès 🙂




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